Au Burundi, deux jeunes cinéastes sont convaincus de faire « le plus beau métier du monde »
19 nov. 2015

« Nous avons créé en 2009, à Bujumbura, notre propre société de production audiovisuelle avec peu de moyens. Nous souhaitions montrer la région des Grands Lacs sous un jour positif à travers des reportages sur ce qui marche, se passe bien. Il y a 5 ans un de nos projets, Caravane, consistait à projeter des films dans les villages du Burundi. Nous nous sommes alors rendus compte que dans les campagnes les gens n’ont pas la chance de voir la télévision. Installer un écran géant sur une colline et projeter un film est donc un évènement exceptionnel qui attire beaucoup de monde !
« Un prof de cinéma m’a dit un jour « vous faites le plus beau métier du monde », car en temps que travailleurs de l’audiovisuel, nous avons la chance de faire des choses et de rencontrer des personnes différentes tous les jours ! Sur le tournage du PNUD à Musenyi (Makamba), nous avons rencontré de nouvelles personnes et nous avons beaucoup appris auprès des habitants des communautés. Il y a de la simplicité, de l’humilité dans leur manière de penser. il y a beaucoup d’amour au fond d’eux mêmes et une grande capacité à partager. Nous avons découvert chez ces personnes beaucoup de solidarité et d’union malgré toutes les épreuves traversées, malgré leurs différences.
« Nous avons aussi appris davantage sur la problématique et l’histoire des rapatriés, et comment les bailleurs et les ONG leur apportent leur aide.
« Le cinéma permet un changement de comportement à travers l’apprentissage. Au Burundi, nous constatons que les outils audiovisuels sont importants pour les activités de sensibilisation au développement. C’est un moyen efficace pour les ONG d’informer leurs bénéficiaires. En accompagnant leurs réunions de petits films leur permet d’ancrer davantage les informations dans la tête des bénéficiaires. Ceux-ci, quand ils rentrent chez eux, en parlent avec leurs enfants, leurs voisins etc. Les messages éducatifs véhiculés par les films d’ONG facilitent la transmission d’un savoir et permettent de tisser des liens entre les personnes.
« Le secteur de l’audiovisuel au Burundi est très avancé par rapport à d’autres pays de la sous région. Beaucoup de jeunes passionnés et talentueux apprennent sur le tas. Dans le milieu de l’audiovisuel, pratiquement tout le monde se connaît et nous sommes très solidaires. Il n’y a pas d’école de cinéma ici, alors on se forme sur internet et on échange nos connaissances. Ceux qui ont l’opportunité d’apprendre à l’étranger, via des stages ou grâce à des bourses, partagent leur savoir de retour ici. Les différentes sociétés audiovisuelles s’échangent également leur matériel, travaillent parfois sur le même film.
S’il y a beaucoup d’entraide entre nous, il n’en demeure pas moins que pour réussir à vivre de ce métier, il nous faut chaque jour livrer un combat énorme !
Actuellement, nous réalisons principalement des films de sensibilisation pour les organisations de développement, car il faut savoir qu’au Burundi, les films de commande ONG, sociétés, etc . représentent au moins 90 pour cent de notre travail de réalisateur vidéo. Le secteur privé est pauvre et l’État n’a pas les moyens de soutenir le secteur du cinéma, Il est donc très difficile pour un jeune de réaliser des films de création. Il va dépenser beaucoup et en tant qu’auteur et il n’en tirera aucun bénéfice ».